dimanche 1 mai 2016

La liberté de procréer et l’obligation d’exister

Vous avez été, vous-même contrainte d’exister, cette existence obligatoire vous donne-t-elle le droit d’obliger quelqu’un d’autre à exister ?

Procréer, c’est fabriquer une existence à l’aveugle. Cette existence tire son corps et son intellect à la loterie, et ce sont d’autres tirages au sort pour les parents, la culture, la société, l’époque, le milieu, l’éducation, la souffrance, la misère, et le reste. Mais pas pour la mort, ça, c’est obligatoire, pas de loterie.

Procréer, c’est fabriquer une existence pour son service, son service personnel, celui du fabricant.

Vous osez fabriquer une existence parce que vous savez par expérience, c’est ainsi depuis des milliers voire des millions d’années, que la personne fabriquée n’aura même pas la présence d’esprit de vous engueuler d’exister, même si elle vit dans des conditions horribles de corps et de milieu.

En fait plus les conditions d’existence sont terribles moins elle aura l’occasion et surtout les éléments de réflexion pour revendiquer.

Votre emprise sur cette personne, votre enfant, est telle que vous pouvez être assurée à presque cent pour cent qu’elle ne vous fera aucune remarque pendant toute votre vie. Vous avez beau jeu puisque vous nourrissez l’enfant, et lui faites croire insidieusement qu’il vous est redevable que vous soyez si attentionné avec lui.

Plutôt facile à réaliser cet endoctrinement, puisque nous naissons vierges de significations culturelles. Vous endoctrinez comme vous avez été endoctriné, sans le savoir, stupidement.

La société, par la culture, a presque tout bridé, colmaté toutes les brèches permettant de remettre en cause la fabrication d’existences absurdes, sans maitrise, et sans raison autre que la pérennité de son existence absurde, d’autant plus absurde qu’elle évolue sans cesse, cette société brumeuse, et n’est donc jamais la même.

Les personnes fabriquées, les nouveaux arrivants dans la Vie sociale, sont conduites jusqu’à la mort dans une routine presque parfaitement huilée. La société a placé progressivement au cours de millénaires les garde-fous, c’est le cas de le dire, interdisant sa remise en cause, et elle continue de les fignoler. La plupart d’entre nous s’y laissent prendre jusqu’à leur dernier souffle.

Tous les contes religieux ou contes idéologiques à dormir debout sont là pour vous aider à berner ce pauvre innocent qui n’a pas demandé à exister, mais va devoir exister au service parental et social. Si on lui laisse le temps de penser, car, pour entrer en société, il faut être spécialisé, ce qui demande un travail acharné. Autant vivre passionnément vous chante-t-on.

Vous voulez être libre d’utiliser votre corps comme bon vous semble. Et vous voulez être libre de procréer puisque cela fait partie des possibilités que vous a offertes mère Nature.

Elle vous a même donné, mère Nature, la possibilité de fabriquer des centaines de milliers de personnes, car vous possédez les ovules nécessaires. Et toutes ces personnes qui ne sont pas vous, vous les appelleriez mes enfants. Dire « mon enfant », c’est pratique, cela vous donne l’impression d’avoir des droits de propriétaire.

Donc vous voulez être totalement libre d’imposer, « libre d’imposer » la Vie à une personne ! Ne remarquez-vous pas une contradiction certaine ?
Cette contradiction ne s’arrête pas là.

Vous ne maitrisez absolument pas le travail utérin, le travail de votre ventre, lorsqu’il fabrique à l’aveugle (d’une manière encore plus sadique que le docteur Frankenstein, qui lui, pourtant, a eu des remords après le premier essai), donc lorsque votre utérus fabrique à l’aveugle votre ou vos enfants, puisqu’il peut aller jusqu’à générer des jumeaux ou des septuplés sans que vous l’ayez demandé.

Il peut aussi se lancer dans la fabrication de handicapés, c’est très coutumier chez lui, ce doit être une sorte de plaisanterie de sa part, la tératologie humaine offre un catalogue grandiose.

Votre liberté s’arrête où commence celle de l’utérus, qui n’est pas à vos ordres. « Votre » utérus est un franc-tireur, un rigolo de première.

Donc votre cher petit handicapé, ce cher enfant, va maintenant être un homme ou une femme libre, avec les mêmes libertés que vous, mais pas avant l’âge adulte et si on lui accorde l’émancipation hors de votre tutorat, selon le handicap.

Ce sont les Droits de l’être humain qui le vantent, ainsi que nos lois françaises, issues de ces mêmes Droits. Il est donc libre de courir sans jambe, libre de pianoter sans main, libre de bavarder sans voix, libre d’être un prix Nobel sans intellect ou simple instituteur avec un QI de 60, libre de concourir à Miss Univers microcéphale… Ainsi le veut la Loi.

De qui se moque-t-on ? De qui vous moquez-vous ? De quoi sommes-nous libres si nous n’avons pas les atouts adéquats ? Votre liberté de procréer vous donne-t-elle le droit de ne pas donner les mêmes avantages à une autre personne (votre enfant) ?

Votre liberté de procréer vous donne-t-elle le droit de priver une ou plusieurs personnes de ces libertés que vous possédez, et auxquelles vous tenez plus que tout ? D’ailleurs est-ce vous ou cette autre personne qui décidez de la qualité des atouts et des types de libertés nécessaires à une vie imposée sans accord, sans contrat, sans précaution ?

Chacun ne voudrait-il pas, ne devrait-il pas, au minimum, exister en ayant les mêmes libertés que les autres, puisque nous avons tous été contraints d’exister pour servir maman, papa, et la Société ?

Si cela est vrai pour soi, alors comment peut-on prendre le risque de ne pas octroyer cette liberté à l’être que l’on désire fabriquer, mais que l’on va fabriquer à l’aveugle, avec des risques immenses sur le dos de celui qui n’a aucun moyen de refuser d’exister ?

Comment un être fabriqué avec des tares physiques ou mentales, qu’il n’a évidemment pas désiré, pourrait-il posséder les mêmes libertés que les autres humains, appelés normaux ?

Comment pourrait-il s’inscrire à un marathon s’il n’a pas de jambe, ou si son cœur est faible ? Comment pourrait-il s’engager dans l’armée s’il n’est pas déclaré apte ? Comment pourrait-il simplement s’inscrire puis aller à l’université s’il est débile mental ?

Procréer, ou plutôt fabriquer à l’aveugle une existence, c’est facile, tous les animaux bisexués le font sans se poser de question.

Il parait normal de pouvoir utiliser notre corps à notre convenance, mais ceux qui existent sont seuls à décider pour ceux qui n’existent pas, et il est bien connu que notre liberté est limitée par celle des autres, ce qu’on peut appeler liberté avec limitations et contraintes sociales.

Est-ce que la liberté de créer une existence est une liberté puisque l’être créé n’a pas le droit de donner son opinion, et que justement la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres ?

Mesdames, vous avez certes la liberté de votre corps, mais l’enfant qui nait de votre corps n’est pas votre corps. C’est un produit de votre corps, mais il n’est pas vous. C’est une entité comme vous que vous produisez. Votre liberté s’arrête où commence celle des autres (à égalité), et votre enfant est un autre.

Vous ne pouvez produire un enfant si cela restreint la liberté d’autrui, et la vôtre d’ailleurs, puisqu’il prend de l’espace, de l’air, de la nourriture qui sont un bien commun.

La mise au monde n’est pas un « droit » naturel, c’est un « pouvoir » naturel, comme d’utiliser ses muscles pour se mouvoir, et, puisque c’est un pouvoir, il doit être régulé. Faire un enfant, c’est faire une personne, c’est ajouter un associé à la nation, associé dont les autres devront tenir compte (vie, éducation, santé, mort).

Le pouvoir de faire un enfant doit être géré par l’ensemble de la nation de façon démocratique. Faire un enfant est d’abord un risque pour l’enfant lui-même (et secondairement pour la femme qui va enfanter), de quel droit poussez-vous une personne à prendre des risques ?

Les Droits de l’homme ne reconnaissent pas le droit de faire un enfant, puisque ce n’est pas une liberté pour l’enfant.

Si vous pensez que votre liberté est importante et qu’un autre ne peut avoir plus de pouvoir sur vous que vous n’en avez sur lui, alors vous devez admettre que procréer n’est pas une liberté, mais un pouvoir que vous avez sur un autre individu, celui que vous allez appeler votre enfant, mais qui est une autre personne, il n’est pas vous ni une reproduction de vous.

Vous devez savoir que la création d’une existence ne sert que ceux qui existent déjà, et si vous mettez cet enfant au monde c’est pour vous que vous le faites, en aucun cas il n’a demandé à naitre.

Vous voulez créer cette existence alors que vous ne maitrisez pas le processus de création, vous ne savez absolument pas ce qu’il va sortir de votre ventre, vous risquez la vie d’une personne pour vos besoins personnels, l’envie de procréer, celui d’appartenir à la société, s’offrir un héritier, pouponner, etc.

Votre corps vous appartient Madame, et vous pensez que cela vous autorise à créer autant d’existences que vous le désirez sans aucune contrainte, que votre désir personnel. Eh bien, Madame, votre liberté s’arrête ou commence celle de l’autre, et votre enfant est un autre.

Vous préférez sans doute créer un Hitler plutôt qu’un Elephantman, mais vous n’avez pas le choix, vous jouez à la loterie sur la tête d’une personne, il est normal que cela vous retombe avec violence sur votre tête.

Et pourtant quand votre enfant va en prison, la société ne vous punit pas, pourquoi ? Parce que si elle punissait les parents il faudrait qu’elle aille plus loin et se punisse elle-même.

Il y a une solution à toute cette gabegie, cette profusion d’idiotie et de sadisme, c’est d’admettre ce que nous sommes, et de corriger le tout en fonction de ce que nous sommes. Encore faudrait-il chercher à le savoir véritablement et surtout véridiquement !

Avez-vous seulement songé, Madame, au minimum, c’est-à-dire à établir un contrat natal avec la Société avant de créer votre enfant, ou simplement à l’assurer comme une actrice assure ses jambes ? Pour qu’il vive bien, dans de bonnes conditions, et qu’il n’aille pas en tôle si vous vous loupez. Et surtout, misère ultime, si votre enfant, cette personne, nait avec une tare physique ou mentale…!

Ce n’est pas aux parents ni à la société de juger de la qualité du corps et de l’intellect de la personne qu’ils désirent créer. Ce n’est pas à eux de juger que les risques qu’elle court sont anodins, ou de simples dégâts collatéraux, et que c’est un risque admissible pour le service parental et social.

Cette personne qui est en passe d’exister a le droit d’avoir le meilleur dans tous les domaines. Êtes-vous certaine, Madame Nulle, de pouvoir lui accorder ce qu’il mérite, ce qu’il désire, qui n’est pas ce que vous pensez ?

S’il n’y avait qu’une seule question, que toutes celles, qui désirent fabriquer une nouvelle existence, devaient se poser, elle devrait être celle-ci :
« Maintenant que j’ai fabriqué un être souffrant, comment défaire la souffrance ? »

Faim
E. Berlherm (Déc. 2015)

(Pour ceux qui préfèrerait écouter ma douce voix ou parce que Maman/Papa volontairement et Dame Nature involontairement leur ont imposé une vue déficiente vous pouvez écouter ce texte sur YouTube, ici  https://youtu.be/CF_x8JNYvPU)


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