dimanche 31 juillet 2016

L'innocent et l’obligation d’exister

Nous sommes tous innocents d’exister. Tous sans exception. Cette absence de responsabilité concernant l’initiation de notre existence implique l’innocence de tous nos actes pendant notre existence.

Nous sommes tous innocents de l’existence de notre corps. Nous sommes tous innocents des constituants de notre corps. Nous sommes tous innocents de la dimension de notre cerveau. Nous sommes tous innocents du fonctionnement de notre cerveau.

Le cerveau est un organe comme les autres. Il fonctionne. Et il fonctionne aussi aveuglément, aussi mécaniquement que notre foie ou notre pancréas.

Nous sommes innocents d’exister avec un cerveau limité et une pensée limitée. Nous sommes innocents de ce que produit notre cerveau de la même façon que nous sommes innocents de ce que fabrique le pancréas.

Notre cerveau fabrique notre pensée. Nous sommes innocents de nos pensées.

Notre pensée est aussi ce qui contrôle rétroactivement ce qu’elle produit. Nous sommes innocents du contrôle. Ce contrôle sur notre corps est un mécanisme de notre pensée, et nous sommes innocents de nos pensées donc de ce contrôle.

Nous sommes innocents de nos sensations, des produits de notre cerveau donc de notre pensée, et de tout ce qu’elles constituent, toutes nos images mentales, toutes nos sensations, toutes nos visions, tous nos sons, toutes nos paroles.

Nous avons des muscles qui permettent de produire nos paroles, nous sommes innocents de ces muscles, de leur activation, et de la pensée qui produit cette activation. Pensée produite par les activités nerveuses du cerveau.

Nous sommes innocents de tout ce matériel de notre corps. Nous sommes innocents de posséder un coeur, de posséder des reins, de posséder des vaisseaux sanguins. Nous sommes innocents de posséder des os, une cage thoracique, et un crâne. Nous sommes innocents de posséder des muscles.

Nous sommes innocents de posséder (pas tout le monde) deux oreilles, deux yeux, un nez, une bouche, deux pieds et deux mains.

Nous sommes innocents de nos jambes et de la marche. Nous sommes innocents de ce que nous disons et de ce que nous écrivons.

Nous sommes innocents de l’index qui appuie sur une gâchette. Nous sommes innocents de notre faiblesse physique qui nous fait victime ou criminel.

Nous sommes innocents d’être fragiles et mortels. Puisque nous sommes innocents d’exister.

Nous sommes innocents de notre naissance. Nous sommes innocents de naitre enfants. Nous sommes innocents de naitre avec un cerveau vierge de signification culturelle.

Nous sommes innocents de devoir apprendre. Nous sommes innocents du contenant et du contenu qu’on y déversera. Nous sommes innocents de nos apprentissages comme des mécanismes qui permettent d’apprendre.

Nous sommes tous innocents de l’univers qui nous entoure. Nous sommes tous innocents de ce terrain de nos jeux inventés et de nos crimes inventés, par nous-mêmes.

Nous sommes tous innocents de la dimension du monde. Nous sommes tous innocents de la gravitation. Nous sommes innocents de l’espace, du manque d’espace.

Nous sommes innocents de l’eau, de l’air, de la Terre, et du feu. Nous sommes innocents de l’oxygène. Nous sommes innocents du gaz carbonique.

Nous sommes innocents du besoin de nourriture, du besoin d'eau, du besoin d'air. Nous sommes innocents de l’existence de l'air, de l'eau, des aliments et des plantes toxiques.

Nous sommes innocents de l’existence des poisons, de l’existence des outils, et des armes. Nous sommes innocents de la matière qui constitue nos faiblesses et nos forces. Nous sommes innocents de nos capacités mentales.

Nous sommes innocents de l’existence de nos sociétés. Nous sommes innocents des règles sociales. Nous sommes innocents de l’existence des autres. Nous sommes innocents de l’existence de nos parents qui sont innocents de l’existence de leurs propres parents.

Nous sommes innocents de la culture dans lequel notre corps baigne et dont il s’imprègne.

Nous sommes innocents des défauts de nos parents, de nos éducateurs, de nos associés-concitoyens. Nous sommes innocents des défauts de nos apprentissages, et du manque de savoir et de compétence de tous nos éducateurs.

Nous sommes innocents de nos amis, de nos voisins.

Nous sommes innocents des religions de nos parents, des religions des humains.

Nous sommes innocents de la Vie. Nous sommes innocents de son évolution. Nous sommes innocents de vouloir la fin de toute vie.

Nous sommes innocents de penser qu’un seul dommage collatéral minime sur une personne est infiniment supérieur au concept de pérennité de la Vie imaginé par les automatismes des cerveaux de personnes qui ont été elles-mêmes contraintes d’exister.

S’il n’y avait qu’une seule question, que toutes celles, qui désirent fabriquer une nouvelle existence, devaient se poser, elle devrait être celle-ci :
« Maintenant que j’ai fabriqué un être souffrant, comment défaire la souffrance ? »

Faim
E. Berlherm   (Juillet 2016)

(Pour ceux qui préfèrerait écouter ma douce voix ou parce que Maman/Papa volontairement et Dame Nature involontairement leur ont imposé une vue déficiente vous pouvez écouter ce texte sur YouTube, ici https://youtu.be/O_fXz8vHxAY )

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